Michel Fourniret franc-maçon, histoire détaillée d’une fake news
- guillaumemichel202
- 17 déc. 2023
- 14 min de lecture
Dernière mise à jour : 18 déc. 2023
Une rumeur se répand en 2018, le pédocriminel et tueur en série Michel Fourniret (1942-2021) serait franc-maçon.
Prenons les faits par ordre chronologique.
Tout commence par la sortie du livre du journaliste Oli Porri Santoro, intitulé : « Le Fils de l’Ogre. Révélations inédites de Selim, le fils des tueurs en série Michel Fourniret et Monique Olivier », paru en 2018 chez Max Milo.
On y apprendrait que Michel Fourniret aurait été initié au Grand Orient de France, à la loge « Les Frères Unis Inséparables », qui travaille rue Cadet à Paris.
Mais que dit exactement l’ouvrage ?
Voici les citations qui concernent notre sujet :
Page 99 :
(Evènement en date du 14 février 2015), Oli Porri Santoro raconte :
« Selim m’a tendu une enveloppe ouverte en papier kraft, dont j’ai extrait plusieurs feuilles de papier, parmi lesquelles un carton blanc savamment plié et découpé. II y avait là une inscription au crayon à moitié effacée par le séjour dans son emballage : "Phrase cachée n° 1507 : vouloir tard, c’est ne pas vouloir". […]
Michel Fourniret, à Selim :
_ Le lieutenant pénitentiaire m’a informé, lors d’un entretien, de ton projet de visite. À ce sujet, si je n’y suis pas opposé ? J’userai, en guise de réponse, de la formule chère à feu mon paternel, Jules Louis Gaston Fourniret, né le 8 mai 1899 à Moiry, dans les Ardennes : "La foire n’est pas sur l’pont !" Venir me voir ? Libre à toi de faire partie d’une gent de spectateurs qui dilapident leurs quelques sous pour venir se repaître les mirettes. "Putain ! Le fauve en cage ?" Libre à toi de t’offrir l’agrément double du voyage et du spectacle du paysage. S’y ajoute la phrase du vénérable Pierre-Paul Deschamps (15) de la loge Les Frères unis inséparables du GODF : "Tout est important. Rien n’est important. On a le temps !"
La note de bas de page (15) indique : Son nom a été modifié.
[…]
Oli Porri Santoro à Selim :
_ Saurais-tu, par hasard, pourquoi ton père fait référence ici à cette association ?
_ Ouais. C’est un sujet qui le passionne depuis des années. Il se vantait d’en faire partie. Il y faisait souvent allusion à l’heure du dîner.
Tout à coup, l’image de Michel Fourniret enchemisé dans un tablier maculé de sang, et tenant dans sa main gantée de blanc une épée flamboyante, flotte devant moi dans les airs.
_ Et Pierre-Paul Deschamps, ça te parle ?
_ Bah ! Comment le saurais-je ? a rugi Selim. Je n’ai rien à voir avec ces illuminés, moi.
[…]
Oli Porri Santoro : Michel Fourniret nous a refilé un tuyau d’importance. Par acquit de conscience, je n’ai pas pu m’empêcher d’enquêter sur le dénommé Pierre-Paul Deschamps. Qui diable est ce P.P.D. ? La réponse est des plus incertaines… Du reste, voici les seules informations que j’ai pu recueillir. Il s’avère que la loge à laquelle Michel Fourniret fait référence dans sa lettre – Les Frères unis inséparables – aurait vu le jour à Versailles, le 1er août 1775. J’ai appris par mes lectures et mes conversations que l’ogre a justement vécu dans ce même département de 1966 à 1984, plus précisément à Clairefontaine-en-Yvelines, mais également à Rambouillet.
Page 107 :
Dans un autre courrier, Michel Fourniret désigne directement Pierre-Paul Deschamps comme son "client en études et réalisations de machines spéciales". Michel Fourniret présente bel et bien son mentor comme son "client", ce qui semble suggérer qu’il se serait acquitté d’un ordre moyennant paiement d’une redevance. Qu’appelle-t-il "machine" ? Qu’appelle-t-il "spéciale" ?
Page 108 :
L’individu susnommé serait à la tête d’un laboratoire d’analyse de biologie médicale connu sous le nom de Labo-Test, du côté de Vanves, une ville située au sud-ouest de Paris.
Page 110 :
Au reste, Pierre-Paul Deschamps reste introuvable. Je n’ai pas trouvé la moindre preuve de son existence, sauf la présence de ce nom dans quelques lettres du tueur en série. »
En résumé, Fourniret se vante d’être franc-maçon, et indique qu’il connait un vénérable de la loge « Les Frères unis inséparables » du GODF : Pierre-Paul Deschamps, qui est un de ses clients pour réaliser des machines spéciales et est à la tête d’un laboratoire d’analyse de biologie médicale connu sous le nom de Labo-Test, du côté de Vanves.
Du coup les recherches vont se tourner sur ce fameux Deschamps.
Une première polémique va être à propos du prénom de Deschamps.
Selim, le fils de Fourniret et Oli Porri Santoro sont invités à l’émission d’Hanouna, TPMP (Touche Pas à Mon Poste) du 10 décembre 2020. Lors de cette émission, une lettre originale de Fourniret à Selim est affichée. Le vrai nom affiché est : Paul-Louis Deschamps.
Or dans l’ouvrage de 2018 d’Oli Porri Santoro, le nom était : Pierre-Paul Deschamps.
Première bizarrerie ? Sauf qu’Oli Porri Santoro indiquait bien dans son ouvrage, en note de bas de page, que le nom était modifié.
Ne trouvant pas de trace de ce Deschamps, Oli Porri Santoro, désespéré, essaye malgré tout de le retrouver, et c’est pour ça à un moment donné, le 10 novembre 2020, il trouve sur internet : un certain Deschamps, officier de la Marine et pense sans preuve que c’est peut-être lui.
Affirmation sans preuve donc, mais surtout, le prénom est cette fois-ci : Pierre-Louis Deschamps. C’est à n’y rien comprendre.
Le 14 décembre 2020, le blog maçonnique Hiram.be indique :
Une rumeur se répand depuis quelques jours selon laquelle le tueur en série Michel Fourniret aurait été initié au Grand Orient de France, à la loge Les Frères Unis Inséparables, qui travaille rue Cadet à Paris. Cette rumeur a pris corps après des déclarations (des affirmations mêmes) du journaliste indépendant Oli Porri-Santoro auteur du livre sur Michel Fourniret « Le fils de l’Ogre ».
J’ai demandé au grand maître du GODF Jean-Philippe Hubsch s’il pouvait confirmer ou infirmer cette « information », et après consultation de la loge et des fichiers de l’obédience il vient de me répondre : Non, Michel Fourniret n’a jamais été initié au GODF, mais ce qui est exact et qui explique en partie cette rumeur, c’est qu’il a bien postulé pour entrer dans cette loge, mais la loge n’a pas donné suite.
Moi, Guillaume Michel, auteur de ce blog, en épluchant mes archives, remarque qu’un P.-Louis Deschamps existe, et qui est Vénérable Maître de la Loge « Les Frères Unis Inséparables », de 1982 à 1984. Remarquant que le blog Hiram.be inique bien que Fourniret a postulé pour entrer dans cette Loge « Les Frères Unis Inséparables », c’est qu’il devait forcément connaitre quelqu’un qui en faisait partie. Sinon, s’il ne connait personne de cette Loge, il aurait envoyé une lettre de motivation au siège du GODF qui ensuite aurait diligenté une Loge pour commencer l’enquête. Mais là non, il postule bien directement pour cette Loge particulière.
Du coup l’histoire de Fourniret qui indique connaitre un Deschamps, vénérable de la Loge « Les Frères Unis Inséparables », devenait pour moi non pas un délire ou mensonge de sa part, mais à priori, un élément de vérité. Fourniret n’aurait pas pu inventer comme ça au hasard un Deschamps, vénérable, d’une Loge au hasard tiens, pourquoi pas « Les Frères Unis Inséparables ».
Du coup l’affirmation de Fourniret qui se vante d’être franc-maçon serait-elle vrai ? Non, on voit mal le GODF par la voix de son Grand Maître mentir. Par contre la réponse du Grand Maître est assez floue. A quelle date Fourniret a postulé dans la loge ? A quelle étape il a essuyé un refus ? (Dès le début ?, après le passage des 3 enquêteurs ?, lors du passage sous le bandeau, il a été blackboulé ? etc).
Pour moi 3 hypothèses restaient :
1) Fourniret connaissait seulement Deschamps de nom ou de visu, mais c’est tout (par exemple la lettre de refus de sa demande d’admission en Franc-Maçonnerie aurait été signé par Deschamps).
2) Fourniret connaissait Deschamps, et Deschamps et lui avaient des relations commerciales (mais Deschamps ignorait tout des activités criminelles de Fourniret).
3) Fourniret connaissait Deschamps, et Deschamps connaissait les activités pédocriminelles de Fourniret. Deschamps est donc dans ce cas-là une brebis galeuse du GODF.
Voyant galérer Selim et Oli dans leur enquête, le 19 décembre 2020, je décide de contacter Selim, pour lui informer qu’un P.-Louis Deschamps existe, et est justement vénérable Maître de la Loge « Les Frères Unis Inséparables ». Et je lui montre un extrait de l’annuaire du GODF de 1983.
J’oublie cette affaire, et par hasard en 2023, en débattant avec un Frère sur la possibilité que le Deschamps Vénérable Maître de la Loge « Les Frères Unis Inséparables » soit bien le même Deschamps que Fourniret indique, je tombe sur la revue de Karl Zéro, « l’Envers des Affaires », N°1, (Mai-Juillet 2021), ou tout un dossier est consacré à l’affaire Fourniret, écrit par Oli Porri Santoro. L’extrait de l’annuaire que j’avais montré à Selim y est publié et surtout ils ont retrouvé le Deschamps et il est même interviewé !
Alors est-ce que ma communication à Selim leur a permis d’avancer dans leur enquête, en tout cas leur a confirmé qu’un Deschamps est bien Vénérable Maître de la Loge « Les Frères Unis Inséparables » ? Ce qui est sûr c’est que juste quelques mois après ils l’ont retrouvé et interviewé.
Avant de passer à l’interview, et de discuter de sa véracité, Oli Porri Santoro écrit page 42 de « l’Envers des Affaires » :
« Même son de cloche du côté de la rescapée, Dahina Le Guennan : "On a effectivement décrit Michel Fourniret comme un tueur isolé, parce que ça fait joli sur le papier, dit-elle. Moi, je crois que c'est surtout Monique Olivier qui était solitaire, mais pas lui. Tout le long de l'instruction, entre 1984 et 1987, il a été dit que Michel Fourniret faisait plus ou moins partie de la franc-maçonnerie et du Rotary Club", rappelle Dahina Le Guennan, kidnappée le 4 septembre 1982 et violée par l'ogre des Ardennes. L'une des rares rescapées de Fourniret ajoute : "Cette proximité, les inspecteurs de la PJ de Versailles me l'ont certifiée."
Il est avéré que Michel Fourniret a bien été membre du Rotary Club, à l'époque où il habitait dans les Yvelines, entre 1966 et 1982. Un don de 40 000 F, soit environ 13 000 €, lui a même été octroyé par ladite association huppée en échange de la fabrication d'un "banc de finissage de cordonnier". »
Passons à l’interview. Le fameux Deschamps a été retrouvé et il est donc là interviewé. Il est indiqué qu’il ne s'agit pas de Paul-Louis mais bien de Pierre-Louis Deschamps.
L’interview pour le coup est intéressant (pages 80-85).
Deschamps indique aussi dans l’interview qu’il a fait son service national et qu’à l'époque, il était officier de marine réserviste.
Cet interview est-il complétement bidonné, inventé ? Il est peu probable qu’il soit faux, pour principalement 2 raisons : Tout d’abord, dans l’interview, Deschamps indique que Fourniret n’a jamais été franc-maçon, et cela va à l’encontre du côté un peu complotiste d’Oli Porri Santoro, qui aurait bien voulu que ça le soit et qui veut voir un réseau maçonnique derrière tout ça. Deuxièmement, il est mentionné dans l’interview un certain « Montesquieu », mais nous en parlerons à la fin. Mettons tout d’abord quelques extraits de cet interview :
« _ Michel Fourniret vous cite dans une lettre en date du 15 janvier 2015, à l'attention de son fils Selim.
Pierre-Louis D. : Je ne vois pas bien de quoi vous me parlez, Monsieur.
_ Dans l'ensemble de ses lettres, Michel Fourniret répète à outrance une phrase, dont il a fait son mantra, et qu'il vous attribue : "Tout est important. Rien n'est important. On a le temps."
_ Pierre-Louis D. : Ecoutez, je ne sais pas.
_ Avez-vous, oui ou non, connu Michel Fourniret ?
Pierre-Louis O. : Oui.
Avez-vous fait sa connaissance en loge, comme il le sous-entend dans sa lettre du
5 janvier 2015 ?
_ Pierre-Louis D. : Absolument pas, non !
_ Michel Fourniret sous-entend pourtant avoir été proche de l'atelier maçonnique Les Frères Unis Inséparables au Grand Orient de France…
_ Pierre-Louis D. : Je ne crois pas.
_ Michel Fourniret vous présente comme le patron de Labo-Test à Vanves, ainsi que son "client et concurrent en études et réalisations de machines spéciales."
_ Pierre-Louis D. : Voilà, ça c'est la vérité, oui !
_ Doit-on comprendre que vous avez côtoyé Michel Fourniret dans un milieu professionnel ?
_ Pierre-Louis D. : Oui.
_ Pourriez-vous décrire le contexte ?
_ Pierre-Louis D. : J'ai eu l'occasion de croiser Michel Fourniret dans les années 1980, à une époque où j'aidais des gens qui étaient mes clients à La Colas, un grand laboratoire de géotechnique routière. Je cherchais quelqu'un pour me construire des prototypes. On m'avait alors conseillé d'aller voir ce monsieur, que j'ai rencontré.
Effectivement. Il était une espèce d'homme brillant sur la construction mécanique. J'avais eu avec lui quelques sympathies. Mais je lui avais fait quelques remarques sur le fait qu’il vivait de manière célibataire, et que ce n'était pas acceptable pour un être humain, être sociable et social par nature Je lui ai dit que ça pouvait poser des problèmes. Nous avions eu quelques échanges sur le sujet. Nous avions aussi échangé essentiellement sur les problèmes de technique. C'est un homme d'une redoutable intelligence ! Il comprend très vite ce que vous lui expliquez. Ce qu'il en fait, c'est une autre histoire… Il a une intelligence vive, mais surtout intuitive qui marche très bien.
_ Comment avez-vous réagi quand l'affaire Fourniret a éclaté ?
_ Pierre-Louis D. : (silence) Il y avait quelque chose de bizarre : Il vivait assez reclus. A l'époque, il fabriquait et restaurait des bancs de cordonniers C'était un génie de la mécanique. De mémoire, Je pense qu'il était autodidacte. A l'époque, il vivait à Clairefontaine en Yvelines, avec une femme [Nicole Clerget] qui n'est pas celle dont on a entendu parler [Monique Olivier]. Un jour, il m'a dit qu'il avait eu des ennuis, et que j'avais eu raison de lui dire de ne pas vivre seul, car il avait fait des conneries A la suite de ça j'ai su qu'il avait été incarcéré. Je n'ai jamais su pourquoi. Je ne m'en suis pas inquiété, d'ailleurs…
_ Le 25 mars 1984 Michel Fourniret a été incarcéré à Fleury-Mérogis pour une dizaine d'agressions et viols sur mineurs, puis condamné le 26 juin 1987 par la cour d'assises de l'Essonne à sept ans de prison, dont deux avec sursis, condamnation assortie de trois ans de mise à l'épreuve. Vous l’ignoriez ?
_ Pierre-Louis D. : Je ne sais pas exactement. J'ai pour habitude d'être assez discret sur ma façon de vivre, de m'exprimer et de regarder les choses. Il avait sa vie privée, et je n'avais pas à m’immiscer là-dedans. Avec certains amis, nous l'avions aidé un peu, surtout son épouse, car il avait quelques difficultés…
Après ça, nous en sommes restes là. Je n'ai plus jamais entendu parler de lui, jusqu'au jour où j'ai reçu une carte de sa part, des années après. Cette carte a d'abord atterri à ma première adresse, que j'avais quittée entre-temps. A l'époque, je travaillais à l'Ecole nationale des travaux publics (ESTP) en Côte d'ivoire. Lui était en Belgique, à côte de Namur. Il y avait une photo sur laquelle il posait. Il avait monté une entreprise de bâtiment Je n'avais pas répondu, jusqu'au jour où j'ai entendu à la radio, le matin, le nom de Monsieur Fourniret. Sur le coup, je n'ai pas tilté. Après avoir vu des photos aux informations, je me suis rendu compte que c'était bien celui que je connaissais. Voilà, je n'en sais pas plus !
_ Vous dites avoir aidé Michel Fourniret et sa seconde épouse, Nicole Clerget, du temps où il était incarcéré pour agressions et viols sur mineurs au motif qu'il avait des "difficultés". Il s'agissait de problèmes de quel ordre ?
_ Pierre-Louis D. : Je ne sais pas.
_ Vous venez de dire à l'instant que vous l'aviez aidé…
_ Pierre-Louis D. : Je ne me… Euh Bah ! Il avait des difficultés Monsieur ! Je pense que son épouse était à la maison, et elle élevait leurs enfants. Il avait deux enfants, de mémoire. Le fait qu’il avait été incarcéré, ce qui semble être le cas, devait lui poser des problèmes de survie. J'appartenais à un groupe d’amis qui travaillait, à l'époque, à aider un peu les gens qui étaient dans le besoin. Donc, on l’avait aidé, comme ça. Voilà !
_ En clair, vous avez aidé sa femme du temps où Michel Fourniret était emprisonné à Fleury-Mérogis ?
_ Pierre-Louis D. : Oui, mais… Euh… Je savais qu'il était en prison, mais je ne connaissais pas les chefs d’inculpation. Je ne m'étais pas du tout soucié de ça. J'avais une carrière internationale. Je me déplaçais beaucoup.
_ Vous avez subvenu aux besoins de Michel Fourniret d'un point de vue financier ?
_ Pierre-Louis D. : Oui, oui… Il avait des ennuis d’ordre financier. Mais quand il était libre, je ne crois pas, car à mon avis, il travaillait beaucoup pour La Colas, où il faisait pas mal de machines C'est comme ça que je l'ai connu, moi !
[…]
_ Selon Michel Fourniret, vous étiez membre du Grand Orient de France...
_ Pierre-Louis D. : Oui, à l’époque, j'étais au Grand Orient. J’étais le Vénérable Maitre de la vieille loge Les Frères Unis Inséparables. A l'origine, c'était la loge militaire et royale des Trois Frères Unis à l'Orient de la Cour, dont faisait partie Philippe d Orleans, le frère cadet de Louis XIV, le musicien Louis Claude Daquin, et pas mal de personnalités. J'ai même appartenu à la Grande Loge Unie d'Angleterre. Disons que j’ai beaucoup voyagé. J'ai quitté le Grand Orient, car j'étais très opposé à certaines attitudes politiciennes, et à l’ingérence permanente du politique.
_ Dans la lettre où Michel Fourniret déclare être l'assassin du ministre du Travail, Robert Boulin qu’il présente comme son "frère maçonnique", il vous cite comme étant son "ami philosophe". Comment l'expliquez-vous ?
_ Pierre-Louis D. : Je suis de formation ingénieur. Je suis un philosophe de pacotille (rires) ! Je fais de la philosophie de comptoir à mes temps perdus, mais je ne me prends pas pour un philosophe (rires) ! Je n'ai pas honte de mon appartenance Bon, je ne fais pas état de ce qui se passe chez nous. Ce qui se passe chez nous, il est important que ça reste chez nous.
_ Avez-vous révélé cette appartenance à Michel Fourniret ?
_ Pierre-Louis D. : Oui, oui ! On en avait parlé, parce qu’il m’avait posé des questions. Il était très intéressé ! Il savait qu'il était dans un circuit fermé. Il le disait. Est-ce qu'il le disait pour en savoir plus, c'est possible…
_ D'après son fils Selim, il se vantait souvent à table d'avoir carrément été initié aux mystères de la franc-maçonnerie…
_ Pierre-Louis D. : Vous savez aussi bien que moi qu’on fait des enquêtes en amont (NDLR : pour toute demande d’admission, le postulant est soumis à trois enquêtes préalables). Au travers des enquêtes, il aurait été très certainement recalé…
_ Le site Hiram.be du Grand Orient de Belgique affirme que Michel Fourniret a bel et bien "postulé".
_ Pierre-Louis D. : C'est possible, oui.
_ Avez-vous fait office d'intermédiaire entre Michel Fourniret et le GODF ?
_ Pierre-Louis O. : Oui, je savais qu'il était intéressé et qu’il voulait rentrer, mais voilà, point !
_ Michel Fourniret a-t-il, oui ou non, dépassé le stade des trois enquêtes qui précèdent l'initiation ?
_ Pierre-Louis D. : Il n'a pas pu pour la simple et bonne raison que, avant que les enquêteurs lui soient délégués, il était en prison. Le Grand Orient en a vu d'autres. J'ai cinquante ans de maçonnerie au compteur. J ai vu de grands maitres partir avec la caisse. On y trouve de tout, aussi des voyous !
[…]
_ Michel Fourniret se serait confié à un "frère maçon" au sujet d'Estelle Mouzin ?
_ Pierre-Louis D. : Non, je ne crois pas, mais il se trouve que la loge Les Frères Unis Inséparables avait un frère du nom de Montesquieu qui a participé aux battues parce qu'Estelle Mouzin était de sa famille. Je ne peux pas vous en dire plus. Je n’en sais pas plus (Interrogé sur ce point par Karl Zéro, Eric Mouzin explique ne pas voir du tout qui peut être ce "Montesquieu", ni avoir connaissance de cette loge. Il ajoute être le seul membre de sa famille à avoir vécu à Guermantes, idem pour son ex-épouse qui est allemande).
_ D'un point de vue rationnel, comment expliquer le fait que votre témoignage n'ait jamais été recueilli par les inspecteurs chargés d'enquêter sur Michel Fourniret ?
_ Pierre-Louis D. : J'ai pensé que je serais entendu. Peut-être que j'ai été protégé par mes appartenances Je ne sais pas. Je me suis posé la question en toute honnêteté de savoir ce que j'aurais dit. D'un côté, je ne supporte pas l'idée du viol. Je serais même pour le rétablissement de la peine de mort. C'est tellement ignoble. D’un autre côté, je ne peux pas dire ça de cet homme (Michel Fourniret), qui est un type brillant pour un tas de choses. Il était capable de donner des idées de conception Qu'est-ce que vous voulez que je dise de lui ? Que c’est un criminel ? Que j'ai eu des doutes ? Non ! Je n'ai pas eu de doutes sur lui. Est-ce que j'ai été aveuglé ? Peut-être. Je ne sais pas quoi répondre honnêtement, je ne peux pas dire que cet homme était une saleté, un type insupportable. On n'a pas le droit de dire ça de quelqu'un si l'on n'a pas vécu ce qu'il a fait. Moi, je n'ai pas vécu ça. Ce qu'il a fait, c'est ce qu'il a fait. Avant lui, il y en a eu d'autres, et après lui hélas, il y en aura d'autres. Son intelligence, il aurait pu l'utiliser autrement. Mentalement, c'est quelqu'un de très fort. Il semble perdre la mémoire. Ça m'étonne ! Je le sens usé physiquement, mais pas intellectuellement. Pour lui c’est un jeu. C’est un grand stratège ! Il a un ego surdimensionné. Si j'avais eu le moindre doute sur l'activité extralégale de ce mec, je ne l'aurais absolument pas suivi. J’avais suffisamment de "frères" policiers autour de moi pour le mettre hors d’état de nuire. »
On ne voit pas pourquoi si cet interview avait été bidonné, ils auraient inventé cette histoire d’un Montesquieu membre de la Loge, et dont Eric Mouzin, interviewé spécifiquement pour ca, dit ne pas connaitre.
Une question demeure : Pourquoi Fourniret écrivait Paul-Louis Deschamps et non Pierre-Louis Deschamps ? Peut-être tout simplement une imprécision à mettre sur le compte d’une mémoire de vieux défaillante (il a alors 73 ans) et qu’il n’avait plus d’interaction avec lui depuis plus de 30 ans.
Fin pour le moment de l’histoire. Peut-être d’autres éléments à venir plus tard, j’y travaille.
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