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Je commente la recension de mon ouvrage qu'en fait le secrétaire général de la Libre-Pensée, Christian Eyschen

  • guillaumemichel202
  • 26 mai 2024
  • 9 min de lecture

Dans mon ouvrage je critiquais un peu la Fédération Nationale de la Libre Pensée (FNLP), notamment depuis la mort d’André Lorulot (1885-1963). Cependant je tiens à le préciser, on est bien d’accord, face au Capital et à la Réaction, on sera toujours du même côté de la barricade.

Concernant Christian Eyschen, secrétaire général de la FNLP depuis 1992, le principal désaccord porte sur l’utilité de l’ésotérisme et du symbolisme en particulier.

J’avais envoyé un exemplaire de mon ouvrage et il me fait l’honneur d’en faire une recension, dans la revue « La Plume et la Pensée » (N°7, mai 2024), la revue maçonnique numérique de la FNLP, supplément gratuit de la revue de la FNLP « La Raison ».  Je lui en remercie.

Pour lire la recension en question, pages 29-35 :

 

(Cette revue « La Plume et la Pensée » indique qu’elle est « l’œuvre de Francs-Maçons, membres de la Grande Loge de France (GLDF) et du Grand Orient de France (GODF), et tous libres-penseurs ». La revue entend faire une distinction entre ésotérisme et occultisme. L’occultisme, ça ne serait pas bien, mais l’ésotérisme, enseignement réservé à des initiés, « ne serait pas obligatoirement irrationnel ».)

 

1) Première remarque à propos de la recension qu’en fait Christian Eyschen : il ne revient pas sur les critiques que je porte dans mon ouvrage sur la FNLP. J’en déduis donc que mes arguments sont valides et solides.

 

Commentons pas à pas cette recension (les extraits que je cite de cette recension de Christian Eyschen sont en italiques).

 

2) J’aurai une méthode « associative » : « untel connait untel qui connait untel et qui connait aussi untel. Donc, ils sont tous pareils ». Ça serait un peu le déshonneur par association. Il faudrait donner un exemple précis. A aucun moment je ne fais ça. Je présente des faits et met en lumière des liens ou affinités intellectuelles, philosophiques.

 

3) Christian Eyschen écrit : « Dans ce livre, je suis catalogué "Rationaliste Franc-Maçon pro-symboliste à fond", avec le commentaire suivant : "On a pu voir que le symbolisme est la porte d’entrée du spiritualisme et de l’ésotérisme délirant". Qui délire ? Je suis donc condamné, à quoi ? Un éclat de rire sera sera ma plaidoirie, ma peine et ma rédemption! »

Ici Christian Eyschen établit un lien que je ne fais pas : quand j’écris : « On a pu voir que le symbolisme est la porte d’entrée du spiritualisme et de l’ésotérisme délirant », ce n’est pas en pensant à Christian Eyschen. Bien sûr que Christian Eyschen n’est pas dans un spiritualisme et un ésotérisme délirant. Il est beaucoup plus sage, modéré et rationnel que beaucoup de ceux dont je critique dans mon ouvrage.

Pour bien comprendre, dans ma conclusion, à un moment donné, j’écrivais qu’on « peut classer les rationalistes en 4 courants :


« Les rationalistes profanes anti-maçon et ou anti-symbolisme (exemple : André Lorulot, Jean-Claude Pecker, Robert Joly).

Les rationalistes francs-Maçons anti-symbolisme (exemple : Saturnin Morin, Gustave Théry, Louis Amiable, Albert Paraf, Robert Imbert-Nergal).

Les rationalistes Francs-Maçons pro symbolisme minimum (exemple : Francis Viaud, Jean Macé, Brengues, Blatin).

Les rationalistes Francs-Maçons pro symbolisme à fond (exemple : Christian Eyschen). »

 

J’enchaine ensuite avec le paragraphe ci-dessous, mais ce n’est pas lié à Christian Eyschen, c’est un propos général, qui, après cette présentation des 4 courants de rationalistes, amène à une autre réflexion :

« On a pu voir que le symbolisme est la porte d’entrée du spiritualisme, et de l’ésotérisme délirant. De même on a pu voir à travers cet ouvrage qu'à différentes époques, des francs-maçons rationalistes se plaignent de la Franc-Maçonnerie, protestant contre le courant spiritualiste qui est trop important. »

Les propos spiritualistes et ésotériques délirants entrent en Franc-Maçonnerie par le biais du symbolisme, c’est juste ça ce que ça signifiait, pas le fait que tous les rationalistes francs-maçons qui aiment le symbolisme sont condamnés à avoir des discours ésotériques délirants.

 

4) Christian Eyschen écrit que je nierai la spiritualité, « or l’être humain est un être spirituel par essence ». Mais à aucun moment je ne nie cela. Je critique le spiritualisme, l’anti-rationalisme, à aucun moment je ne critique la spiritualité athée, laïque, ou autre concept du même type.

« Nier qu’il existe des spiritualités et que les symboles peuvent les accompagner, c’est faire le plus beau des cadeaux aux religions ».

Oui des symboles existent, des spiritualités aussi. Mais la question est l’utilité du symbolisme. Et du symbolisme maçonnique plus précisément. Pourquoi nous y présenter la kabbale, l’alchimie, la gnose, la mythologie égyptienne, etc., spécifiquement?

On a le droit de penser (et de dire) - et d’autres rationalistes pensent d’ailleurs la même chose - que l’ésotérisme et le symbolisme en particulier est soporifique, chiant à lire, d’aucun intérêt, irrationnel, et surtout je ne vois pas en quoi il pourrait m’aider à m’améliorer et à me perfectionner.

 

Je cite par exemple dans mon ouvrage Robert Joly (1922-2011). Il fut président de l'Union Rationaliste de Belgique (1957). Il écrit : « Je n’aime pas du tout le rite, tout le côté symbolique, compliqué, complexe - question de tempérament. […] Je suis réticent envers toute pensée symbolique, qui ne me semble jamais très éloignée de l’irrationalisme, et dans laquelle on peut engouffrer à peu près n’importe quoi. » (Cahiers Marxistes n°193 (février-mars 1994), dédié au thème : « être de gauche et maçon ? », pages 48-51).

Ou encore l’astrophysicien Jean-Claude Pecker (1924-2020), membre du conseil d’administration de l'Union Rationaliste (1985-1989) et président de l'AFIS (L'Association française pour l'information scientifique) 1999-2001, qui écrit : « je n’ai pas la fibre des symbolismes francs-maçons. » (« A cœur ouvert, combats pour la raison », Editions Arléa-Corlet, 1994, page 11.)

 

5) Ensuite Christian Eyschen explique pourquoi il est devenu Franc-Maçon et pourquoi il aime le symbolisme. Mais il termine cette partie par « Beaucoup d’autres, et c’est bien normal, ne partageront pas ma conception du Hobbing. Je ne les empêche nullement de faire autrement et autre chose. Mais qu’ils n’entendent pas m’imposer quoi que ce soit au nom d’un "jugement moral" (version moderne de la pensée totalitaire, dite "unique" en ce moment) digne des Inquisiteurs. C’est ce que je reprocherais principalement à l’ouvrage traité en référence. »

Je n’ai pourtant pas l’intention d’imposer quoi que ce soit. Je donne juste mon avis. Un avis qu’on entend peu, et que j’ai voulu mettre en lumière. Une libre critique.

Quand la Franc-Maçonnerie est plutôt pro rationaliste, je n’ai rien à dire, mais quand la Franc-Maçonnerie est majoritairement pro-spiritualiste, quand le courant rationaliste est minoritaire, alors oui je suis critique.

Peut-être est-ce le moment de dire pourquoi j’ai écrit ce livre. Principalement pour deux raisons :

_ La première raison, c’est le décalage entre les discours que j’entendais (et que le public entend) sur les plateaux de télévisions, et ce que moi je lisais dans les revues maçonniques. C'est-à-dire que sur les plateaux de télé, les francs-maçons ou Grand Maîtres interviewés tiennent des discours à propos de la Franc-Maçonnerie où il est question de philosophie, de s’améliorer soi-même, d’humanisme etc.

Et jamais (ou très peu), ils n’abordaient ce que moi je lisais dans les revues ou ouvrages maçonniques eux-mêmes, c'est-à-dire des articles qui parle de christianisme ésotérique, de kabbale, d’alchimie, de symbolisme délirant.

_ La deuxième raison, c’est tout simplement que j’en avais les capacités, les archives nécessaires. Quelqu'un hors du milieu, même animé par la plus forte volonté zététique du monde, n’aurait pas eu accès à tous les faits et documents que je présente, et donc n’aurait pas pu en tirer une étude solide sur ce sujet de la lutte d’influence entre rationalistes et spiritualistes.

 

6) Le 2eme grand volet de la recension porte sur les rapports entre la Franc-Maçonnerie et le socialisme/communisme. Malheureusement, je ne sais pas si c’est dû à une lecture inattentive, ou à des lunettes antistaliniennes primaires, mais Christian Eyschen écrit : « L’ouvrage a pourtant un grand intérêt, à découvrir entre les lignes. On voit clairement comment, à une époque désormais révolue, le PCF a utilisé l’Union rationaliste comme un instrument de pénétration dans le GODF. C’était l’application stricte du Stalinisme. »

Or je démontre justement dans mon ouvrage le contraire, les membres de l’Union Rationaliste qui se trouvent au sein de la Franc-Maçonnerie, sont d’anciens membre du PCF, des déçus, des critiques. La Franc-Maçonnerie leur servant en quelque sorte de refuge.

Là où il y a pu y avoir des volontés de pénétration, c’est au sein de l’Union Rationaliste : des francs-maçons rationalistes poussaient des frères Francs-Maçons à adhérer à l’Union Rationaliste, de même que certaines cellules du PCF poussaient certains de leurs membres à adhérer à l’Union Rationaliste (dans des luttes de mainmise contre d’autres courants socialistes).

 

7) Un argument qu’on entend souvent et qui me fait sursauter à chaque fois, c’est celui du : faut en être pour comprendre/connaitre. Christian Eyschen écrit :

« Léon Trotsky, le rédacteur principal de cette condition, avait dit en substance " j’ai étudié les Rituels maçonniques, et c’est un truc de collaboration de classes". Il les avait peut-être lus, mais il est visible qu’il n’y avait rien compris. Comment comprendre un Rite sans le vivre ? On peut tout savoir sur la recette du Canard à l’orange (comme le disait un ancien Grand Maitre du GODF pour qui j’ai toujours beaucoup d‘estime), sa structure, sa composition chimique, son poids, ses recettes…, mais tant que l‘on n’en aura pas mangé un, on ne sait rien. Idem pour la Franc-Maçonnerie. Le vieil adage : "La Franc-Maçonnerie est un mystère que l’on ne peut comprendre qu’en la pratiquant soi-même" est profondément vrai. »

 

Je vais être volontairement provocateur, mais :

Faut-il être un tueur pour comprendre que tuer c’est mal ? Et point Godwin :

Un historien doit-il être nazi ou ancien nazi pour bien comprendre et écrire sur le nazisme ?

Alors c’est sûr l’historien ne pourra pas ressentir exactement ce que le nazi ressentait en lui-même dans son petit cœur. (En revanche, il peut le demander à un ancien nazi).

 

8) Je remercie en tout cas Christian Eyschen pour sa conclusion, il écrit : « En conclusion, bien que ne partageant pas du tout son contenu, mais en remerciant l’auteur de n’avoir pas ignoré (loin s’en faut) la Libre Pensée […] et surtout eu égard au travail colossal de cet ouvrage et des questions qu’il pose, je ne puis que recommander son achat et surtout sa lecture, il peut être utile. »

 

Je me permets pour terminer de faire cette remarque : pas un seul mot dans cette recension sur le Martinisme (qui est pourtant au centre de l’affaire). Celui qui ne lirait que cette recension ne saurait pas que le sous-titre de mon ouvrage est : martinistes et guénoniens contre rationalistes. Les faits, les coulisses, les forces en présence).

Un regret, j’aurai bien voulu avoir des anecdotes de la part de Christian Eyschen sur ces sujets-là. Du style tel jour à telle Tenue, un martiniste à dit telle chose, il s’est passé ensuite telle réaction. J’ai entendu telle chose délirante, il y a eu des oppositions, etc.

 

 

PS : Christian Eyschen écrit : « L’auteur utilise la LCR (pabliste) et les brochures d’Henri Weber pour attaquer les "Lambertistes". » Je cite juste comme ça une diversité d’auteurs socialistes (un LO, un LCR, etc.) mais j’aurai pu en citer bien plus.

Je ne les ai pas cités dans l’ouvrage mais je peux citer d’autres exemples parmi d’autres :

 

_ Robert Degris (1920-2002) est un cheminot, syndicaliste CGT-FO. « Il admettait avoir été attiré par la franc-maçonnerie, par ses aspects humanistes et formateurs, tout en récusant ses rites et son fonctionnement ».

Il se considérait comme un syndicaliste pur. Il était profondément attaché à l’indépendance syndicale et n’était pas sans reprocher aux syndicalistes proches d’Alexandre Hébert à la CGT-FO des ambitions politiques non avouées. (Source : sa Fiche Maitron)

 

_ Pierre Bailly (1912-1945) est un comptable et militant trotskyste. Il attacha son nom à une brochure qu’il signa et qui fit grand bruit dans le PSOP (Parti socialiste ouvrier et paysan) car elle posait la question de la franc-maçonnerie à laquelle étaient affiliés des dirigeants importants du parti comme Marceau Pivert. Il écrivit notamment : « La "culture maçonnique" est un fétide galimatias, mélange de symbolisme attardé, d’idéalisme vulgaire et de tous les lieux communs éculés de la IIIe République. » (Brochure : Oui, la Franc-Maçonnerie est un danger.) Il présenta son point de vue le 13 mars 1939 et polémiqua avec des responsables comme Suzanne Nicolitch. La majorité du PSOP au congrès national de Saint-Ouen (27-29 mai 1939) se prononça pour le maintien de la double appartenance. Léon Trotsky fit grand état de la brochure de Pierre Bailly et loua la qualité de ce travail dans son article « Le trotskysme et le PSOP », du 25 juillet 1939. (Source : sa Fiche Maitron)

Voici ce qu’écrit Trotsky : « Ces jours-ci, j’ai reçu une excellente brochure de Pierre Bailly, Oui, la Franc-maçonnerie est un danger. Après avoir rejeté un fouillis psychologique et philosophique qui n’a pas la moindre valeur, car tout au long de son évolution la maçonnerie n’a pas apporté la plus petite contribution ni à la science ni à la philosophie, l’auteur aborde la question en termes de marxisme, c’est-à-dire du point de vue social. Se fondant sur les documents mêmes de la maçonnerie, il en démontre le rôle impérialiste, réactionnaire et démoralisant. La brochure de Bailly est, soit dit en passant, la meilleure preuve qu’à la différence de tous les autres groupes et fractions, nos camarades savent aborder les problèmes importants en révolutionnaires prolétariens. Même le simple fait que la brochure sentimentalo-bourgeoise et vide de Nicolitch soit très bien éditée tandis que l’ouvrage sérieux de Bailly est tiré à la ronéo, est une belle illustration de la condition sociale des idées centristes et des idées révolutionnaires. » (Léon Trotski, Œuvres 21, avril 1939 à septembre 1939. Institut Léon Trotsky, Paris 1986, pages 268-292.)

 
 
 

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